Lecture de 6 mn

Cet article fait référence au travail de James Clear sur les habitudes. Je vous recommande la lecture de son blog et de son livre Atomic Habits, disponible en anglais ou en français.

Cet article, plus long que d’habitude, est la 3e partie d’une série d’articles qui en fera 4, sans doute 5. Consultez la partie 1 et la partie 2. Vous pouvez aussi consulter cet article sur la pensée positive.


Un objectif est quelque chose qu’on veut obtenir dans un certain délai.

  • Avoir tant de clients par mois
  • Faire tant de chiffre d’affaires pour ce trimestre
  • Perdre 10 kilos avant l’été
  • Écrire un livre dans les six prochains mois.

Définir des objectifs n’est pas aussi simple que de dire « Je veux perdre 10 kilos », les objectifs doivent être S.M.A.R.T. et c’est loin d’être évident de le faire seul.

Si les objectifs sont importants et peuvent servir de puissants propulseurs, ils ont aussi leurs limites et leurs pièges.

Les pièges des objectifs

Les objectifs ont une fin et peuvent mettre face à la malédiction du vainqueur ou empêcher de faire l’expérience du bonheur.

Les objectifs sont plus sensibles aux éléments extérieurs comme une blessure, une dépense imprévue, des problèmes familiaux etc.

Ne pas atteindre l’objectif va ajouter des émotions désagréables à une situation déjà difficile.

Cela peut même renforcer la culpabilité et les problèmes d’estime de soi, même si « on sait » que ça n’est pas de notre faute.

Ces émotions n’arrivent pas avec les habitudes.

Les objectifs sont une charge mentale, ils demandent de l’attention et occupent l’esprit.

Notre attention et notre volonté sont des ressources épuisables.

Lors des périodes plus difficiles de la vie, la charge mentale d’un objectif va le rendre moins prioritaire, et il passera à la trappe.

Le problème est quand la gestion des objectifs devient un travail à temps partiel.

Les recommandations pour réussir à atteindre son objectif sont légion : tenir son journal, gérer ses tâches, noter ses avancées au quotidien, par semaine, par mois, par trimestre.

J’ai testé tout ça, je brassais du vent et mes moments les plus efficaces de la journée se perdaient en futilités.

Ces techniques – comme beaucoup d’astuces de productivité – nous affaiblissent et occupent une charge mentale importante, quand ça n’est pas une façon active de procrastiner, ce qui n’est pas toujours facile à détecter.

Les objectifs peuvent piéger notre cerveau, comme avec la pensée positive ou les biais des milieux du bien-être.

Notre cerveau peut confondre la définition d’un objectif avec sa réalisation parce que s’être fixé un objectif semble être une fin en soi.

Fait intéressant, cet effet est plus prononcé lorsqu’on informe les autres de nos objectifs. Ce qui va à l’encontre du conseil fréquent de partager en public ses objectifs. Les phénomènes sociaux ne jouent pas toujours qu’en notre faveur.

Ce piège dans lequel tombe notre cerveau est d’ailleurs un souci majeur dans certaines pratiques où faire vivre la réussite peut générer des problématiques complexes, et même mener jusqu’à la déréalisation.

La personne a l’air d’aller bien sauf qu’elle vit dans un monde parallèle, déconnectée de la réalité et à côté de ses pompes.

J’en ai vu beaucoup en cabinet, surtout chez les thérapeutes et les adeptes du développement personnel et de la néospiritualité.

Ils ont tous un point commun.

Ils pensent que ça n’est pas leur cas, et qu’on ne comprend rien à la vie et l’univers lorsqu’on parle de ces problèmes. L’ego spirituel du développement personnel dans toute sa splendeur.

Réparer ces dégâts est long et douloureux car c’est comme le burn-out, la personne ne réagit qu’après s’être pris le mur…

Les objectifs peuvent nous limiter, car on se fixe des objectifs avec ce qu’on se croit capable d’atteindre.

L’histoire la plus connue sur ce sujet est celle de Roger Bannister, qui réussit à courir le 1500m en moins de 4min lorsque cela semblait impossible à tous. Son record fut rapidement battu et de nombreux coureurs réussirent à passer sous la barre des 4min peu après.

Il faut croire que quelque chose est possible pour pouvoir le mettre en objectif.

Cela demande un travail important de déconstruction pour libérer les croyances limitantes et les blocages qui peuvent empêcher de se fixer des objectifs à la hauteur de nos capacités.

Citer Mark Twain et son fameux « Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait » ne suffit pas à régler ce problème complexe.

Je ne compte plus le nombre de fois où j’ai vu des praticiens en hypnose se poser de petits objectifs parce qu’ils ne se sentaient pas capables de plus, ou des entrepreneurs se mettre des objectifs de chiffre d’affaires qui ne faisaient que limiter leurs revenus années après années.

Ne faites pas ces erreurs.

La clé est de travailler sur ce qu’on ne voit pas, ce qui est fait chaque jour, quelles que soient les circonstances. Certains appellent ça la discipline, mais c’est bien réducteur.

Quelles différences entre les objectifs, les habitudes et les systèmes ?

Imaginez que vous avez envie de lire plus de livres.

  • Vous pourriez vous fixer comme objectif de lire 50 livres d’ici la fin de l’année.
  • Vous aurez besoin de créer une habitude pour lire régulièrement
  • Vous aurez besoin d’un système qui vous permet de créer cette habitude

L’idéal est de se focaliser sur les objectifs dans la mesure où ils donnent une direction, et de mettre son énergie sur les habitudes qui nous serviront toute la vie et qui développent des compétences, quelles que soient les conditions et nos envies, objectif ou non.

Avant de parler des avantages des habitudes, tuons une idée reçue.

En finir avec l’idée reçue des 21 jours

Cette légende urbaine est sans doute une des choses fausses qui circule le plus. C’est enseigné et intégré par les élèves sans plus d’explications. Certains programmes et formations se basent même dessus comme stratégie de réussite.

Cette idée vient d’un livre de 1960, « Psycho Cybernetics », écrit par le chirurgien plasticien Maxwell Malts. Il disait avoir remarqué qu’il fallait environ 21 jours aux patients pour s’habituer à leur nouveau visage après une chirurgie plastique.

La désinformation et les généralisations ont fait le reste.

Dans son étude, Phillippa Lally, chercheuse en psychologie, a cherché à déterminer combien de temps il faut pour former une habitude.

Les habitudes choisies par les personnes étudiées allaient de tâches simples « boire une bouteille d’eau au déjeuner » à des plus difficiles comme « courir pendant 15 minutes avant le dîner ».

Résultat :

  • Il faut en moyenne plus de 2 mois – 66 jours pour être exact – avant qu’un nouveau comportement devienne automatique.
  • Le temps nécessaire pour installer une nouvelle habitude peut varier entre 18 et 254 jours en fonction de la charge mentale de l’habitude à installer

Des attentes réalistes sont un paramètre important pour éviter de vivre les mauvais côtés des objectifs.

Alors au lieu de vous fixer 21 jours comme vous pourriez voir ici et là, vous feriez mieux de vous attendre à ce que ça prenne entre 2 et 8 mois, ça vous évitera certains écueils liés aux objectifs.

L’avantage des habitudes

L’avantage le plus important des habitudes est qu’elles nous font dépasser nos objectifs et maintenir le mouvement.

Par exemple, mon objectif est d’installer une habitude d’écriture, c’est le seul but de départ. Cette habitude sera la fondation qui me permettra d’atteindre des objectifs plus importants.

Mais surtout, il m’aide à me redéfinir.

Nous sommes nos habitudes.

Dis moi ce que tu as comme habitudes et je te dirai qui tu es

Si « je suis » mes habitudes et que je veux pouvoir dire « je suis écrivain » un jour, il faut que mes habitudes me définissent comme écrivain.

Ça fonctionne pour moi, car publier un livre, dans mon esprit, ne ferait pas de moi un écrivain. Être écrivain, pour moi est un mode de vie, pas le résultat de publications.

Cette définition du « je suis » sera différente pour chacun.

Pour le poids, c’est la même chose. Vouloir perdre 10 kg n’est pas efficace. Se définir et incarner « manger équilibrer et faire du sport », nettement plus. Le poids n’est plus un but, il est devenu une conséquence de ce qu’on veut pouvoir se dire en regardant nos habitudes.

L’habitude est un acte de joie et de bonheur, et la satisfaction de l’histoire qu’on se raconte en découle. (pour mieux comprendre cette phrase, relisez cet article).

Dans mon cas, je me suis fixé « écrire chaque jour un article d’au minimum 400 mots et qui porte sur une idée et une seule ».

C’est ce qui me parait atteignable, quelles que soient mes journées.

Je n’y ai attaché aucun objectif autre que de faire une habitude qui me met en joie. Certains jours, j’écris 2000, 3000, voir 4000 mots.

Cette habitude ne m’aide pas qu’à écrire des articles, j’ai un livre en cours et des programmes d’ateliers, tous construits sur la base de cette habitude.

Et c’est là que se cache le truc génial.

Ces idées et projets sont nés de mon habitude d’écriture, pas l’inverse.

Des idées j’en ai pour le reste de ma vie, des idées concrétisées, beaucoup moins.

C’est parce que j’écris que le livre s’écrit.

Une idée d’article a évolué vers une série 3 articles, puis 4, puis 10, j’ai décidé de ne pas les publier et de les transformer en livre.

Quelques notes sur mon téléphone ont généré 4 idées d’ateliers.

C’est très différent de ce que je pouvais vivre avant, la charge de réflexion sur l’avenir et les projets est reportée sur l’habitude, sans effort.

Pour conclure cette 3ème partie, les habitudes ont de nets avantages :

  • Les habitudes sont automatiques et ne demandent aucune charge mentale
  • Une habitude ancrée peut durer toute la vie
  • Les habitudes ont un effet sur des domaines connexes : par exemple, les personnes qui commencent à faire de l’exercice quotidiennement peuvent finir par mieux manger.
  • Les habitudes peuvent être aussi petites et simples que nécessaire et font donc moins peur

Nous sommes nos habitudes, pas nos objectifs.

Mettre en place des habitudes demande de la finesse.

Parce que si une habitude ramène à des choses simples, ce qui est simple à faire est aussi simple à ne pas faire.

Le temps que l’habitude s’installe, il faut réussir à mettre en place ce qui va permettre de continuer de la faire, sans que ça devienne une contrainte ou une charge mentale trop importante.

C’est là qu’entrent en action les systèmes, le sujet de l’article de demain.

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À propos de Laurent Bertin


Ancien directeur informatique dans une grande banque française, j’ai tout quitté du jour au lendemain pour devenir praticien en hypnose. J’ai développé mon cabinet, suis devenu formateur, co-directeur d’un grande centre de formation pour tout quitter à nouveau et vivre de mon activité grâce à Internet.

Aujourd'hui, je vous apprend à gagner plus, travailler moins (et mieux) et à profiter de la vie en créant votre marque personnelle pour devenir une autorité dans votre domaine.