« Tu as toujours le choix ».
Une phrase qu’on entend souvent, présentée comme quelque chose de puissant et moteur pour avancer dans la vie. C’est utile à plein de gens et tant mieux.
Mais je pense que cette phrase est fausse.
Ceux qui incarnent cette phrase n’ont pas « toujours le choix ».
En vérité, ils n’ont pas le choix, toutes les autres options sont interdites.
Choisir d’abandonner, de se laisser aller, de sombrer dans la noirceur de sa souffrance n’est pas une option, c’est interdit, c’est pire que la mort.
« Tu as toujours le choix » est l’expression d’un « Tu n’as pas le choix » qui vient des profondeurs de l’âme, du regard sur la vie et d’un rejet profond de la position de victime.
« T’as pas le choix » est la principale ressource des personnes résilientes, qui passent à l’action et qui agissent malgré les peurs.
Pour les indécis, les perfectionnistes, les imposteurs… le choix est synonyme d’immobilité.
Cette indécision tue.
Elle tue les entrepreneurs, les indépendants, la joie dans la vie, elle déprime.
J’en connais un rayon sur cet immobilisme… mais ça m’a aidé à comprendre comment prendre des décisions, comment passer à l’action plus vite et surtout à y revenir quand je traîne et m’enferme dans ma tête et mes analyses.
La meilleure décision arrive quand il n’y a pas de décision à prendre
Pour que l’immobilisme et la procrastination cessent, il faut réussir à ne plus avoir de choix, il faut que les autres options deviennent de mauvais choix.
Encore mieux, qu’elles deviennent des choix impossibles, inexistants.
J’aime les films de guerre.
Pas parce qu’ils sont violents mais parce qu’ils m’inspirent sur l’état d’esprit, l’honneur, le courage, la fraternité et parce qu’ils me reconnectent à une réalité, souvent bien pire que celle qui peut me poser problème en ce moment.
Récemment j’ai revu la série Band of Brothers, je suis fan de Soldat Ryan et de « Tu ne tueras point ». Ce sont des films que je regarde quand j’ai besoin d’agir, de sortir des moments moins cools de la vie.
Ils m’aident à sortir des moments sombres car je me demande toujours comment ces soldats font pour continuer d’avancer et d’obéir quand la mort est quasiment assurée ?
Ça n’est possible que si la fuite n’est pas une option, que si elle est intolérable, que si elle est pire que la mort. Toutes les autres options ne sont plus des options, elles n’existent simplement pas.
Pour qu’elles n’existent pas, il faut qu’elles soient pire que la mort.
Pour eux, pire que la mort c’est être un lâche, quelqu’un qui abandonne ses équipiers, sa patrie, sa famille et les valeurs qu’ils défendent.
Le courage prend sa source dans un non catégorique : celui de ne pas devenir cette personne qui n’osera plus jamais se regarder dans la glace. Ce qui compte n’est pas ce qu’on fait, mais qui on devient quand on agit (ou pas).
« Pour faire ce que tu as à faire, tu dois accepter d’être déjà mort » disait un sergent à un soldat paralysé par la peur.
Puissant. Accepter que le pire est déjà arrivé ne laisse plus de place à autre chose que l’action.
C’est presque une philosophie stoïcienne et une des habitudes des personnes qui réussissent si chère à Steven Covey : commencer par la fin.
Écrire son épitaphe, commencer sa journée en se demandant comment on la vivrait si c’était la dernière, se connecter à la fin pour revenir à ce qui compte et relativiser tout ce qui ne compte pas vraiment.
Que se passe-t-il si chaque décision devenait une question de vie ou de mort ?
Que se passe-t-il si nos indécisions font de nous un lâche et que c’est cette personne qu’on regarde vraiment dans le miroir ?
Que se passe-t-il si la vie de ceux qu’on aime était en danger ?
Il n’y aurait plus de choix, plus de questions, que de l’action.
Un soldat qui a peur s’entendra toujours dire « Tu n’as pas le choix ! », et pas « Tu as le choix ».
C’est comme un coach. On peut savoir ce qu’il faut faire mais ne pas le faire, un bon coach ne laisse pas le choix, il est là lorsqu’on a envie de ne pas faire, d’abandonner, de céder à la facilité.
Mais l’idée n’est pas non plus de se balader avec un coach en permanence ou d’être face à la mort.
La question se pose alors : comment créer cette absence de choix qui force l’action et la décision quand on n’est pas dans un contexte de vie ou de mort ?
Comment faire quand on est seul et que la facilité toque à la porte ?
La solution : trouver son chat et son fromage
Dans le stage Odyssée qu’on anime avec JP, c’est ce qu’on fait faire aux stagiaires.
On les pousse à fond dans les retranchements de ce qu’ils sont, de ce qu’ils fuient et de ce qui les anime pour qu’il n’y ait plus de décision à prendre.
Pour que ce qui reste soit comme une évidence.
N’existe plus qu’alors un élan vers l’avant, sans analyse, sans question inutile, juste de l’action authentique.
Pour ça, on utilise l’analogie du rat, du fromage et du chat, qui vient d’une étude qui a été faite sur les rats.
Des rats sont attachés à une corde, on les met devant un tunnel avec un bout de fromage au bout et on mesure la pression qu’ils exercent sur la corde pour atteindre leur fromage.
Ensuite, on fait la même chose mais cette fois-ci on retire le fromage et on met un chat à l’entrée du tunnel puis on mesure à nouveau la pression exercée par le rat.
La conclusion est logique : la pression mise pour fuir quelque chose est beaucoup plus forte que lorsqu’il s’agit d’aller chercher du fromage. C’est le levier de souffrance dont je parle dans ma conférence et sur lequel j’insiste depuis des années.
Mais ce qui n’est pas évoqué dans cette étude, c’est que les chats ont un tunnel, ils ont une direction claire à prendre, ils n’ont pas le choix.
La décision d’avancer qui existe parce qu’elle n’a pas besoin d’être prise vient de l’absence de choix qu’ont les rats.
Elle prend sa source dans 3 éléments clés :
- L’envie, la joie (le fromage)
- La souffrance à éviter (le chat)
- La direction (le tunnel)
Pour la joie et la direction, je vous recommande de lire ou relire mon article « Comment trouver un sens qui tient sur la durée » en cliquant ici.
La souffrance à éviter est un sujet complexe.
Il faut réussir à la décorréler des traumas et des expériences douloureuses car la souffrance dont je parle est plus profonde, plus lointaine, presque comme si elle était là depuis toujours.
C’est cette souffrance qui, même travaillée en thérapie, est toujours présente.
Cette souffrance qui, trop travaillée en thérapie, rend presque apathique, comme une forme de perte de sens, de motivation et de mouvement.
Les souffrances ne sont pas toutes faites pour disparaître, elles sont faites pour s’intégrer, et sont souvent nos moteurs les plus puissants.
Pour la trouver il faut trouver la vérité profonde derrière les masques, les peurs et les doutes.
C’est un exercice difficile à faire, car il faut être poussé dans ses retranchements.
Moi, ça me fait du bien de m’y reconnecter quand ça ne va pas fort.
Me reconnecter à cette peur de ne pas être accepté tout en ne voulant pas appartenir à cette planète qu’on nous propose.
Je sais ce que les thérapeutes me diraient : « Si tu as peur de ne pas être accepté, c’est que tu ne t’acceptes pas. »
Peut-être. Sans doute. Ça m’est égal.
Reste que je trouve ça idiot, pour rester poli.
On transforme une peur, une structure fondamentale en injonction qui ne mène bien souvent qu’à un sentiment d’impuissance et une estime de soi encore plus faible quand on se rend compte que rien n’a vraiment changé.
Je passe mon temps à déconstruire ça dans mes stages et coachings.
Les gens expriment des idées et des envies qui partent d’une non-acceptation de ce qu’ils sont, et d’injonctions à être autrement, différent. Ils m’entendent alors souvent dire « Hmm », « Mouais », parce que je sens cette incongruence, ce truc pas juste en eux.
Souvent ça pique.
Mais c’est salvateur.
À vouloir « s’accepter », ils partent dans une mauvaise direction, ne font pas de leurs souffrances le chat qui les pousse vers l’avant, et perdent en route leur joie à chasser des rêves qui ne sont les leurs.
J’ai vécu ça pendant des années à essayer de « travailler sur moi », à écouter les mauvais conseils de formateurs ou de gourous qui ne faisaient que renforcer cette non-acceptation de ce que je suis.
Merde.
Je préfère accepter que ce soit là, et c’est ok que ce soit là.
Mais comment peut-on être ok avec soi-même et sa vie alors qu’on a peur de ne pas être accepté et qu’a priori on ne s’accepte pas ?
Simple.
Il suffit d’arrêter de chercher à s’accepter, et simplement d’accepter ce qui est, avec les avantages et les inconvénients.
Pour moi, c’est un sacré moteur, et sans aucun doute le plus puissant chez moi, cette souffrance fait de moi ce que je suis dans mon couple, mes relations, mon travail, ma vie.
Cette non-acceptation est ma marque de fabrique, elle part d’un non catégorique, d’un refus de ce que je n’aime pas et de ce qui ne me convient pas :
- Je n’accepte pas de me sentir nul : j’apprends et je bosse pour que ça change
- Je n’accepte pas que mon couple s’effondre : je prends mes responsabilités et change radicalement ma façon de voir l’amour et le couple
- Je n’accepte pas de me regarder dans la glace et d’y voir un tocard : je me bouge et passe à l’action
C’est cyclique ? Soit, c’est la vie, et ce n’est pas bien grave.
Et si le coût à payer est que parfois je me sens nul et pas à ma place, pas de problème, c’est pas cher.
Et j’aime plutôt ça, même si des fois ça fait mal.
En acceptant l’existence de peurs et de souffrances comme des composantes intégrales de ce qu’on est et de ce qu’on fait plutôt que des anomalies à éradiquer, elles se transforment en moteurs et les bénéfices sont nombreux :
- Moins de charge mentale, car tout est plus clair
- Meilleure productivité, car moins de temps est perdu en hésitations
- Une confiance décuplée car chaque action devient un pas de plus vers une estime de soi plus solide.
- Réduction du stress et de l’anxiété car plus de clarté diminue l’incertitude qui renforce l’anxiété.
- Une libération de la créativité car l’énergie mentale n’est plus drainée par l’indécision.
Bref, lâcher la paralysie par analyse et oser décider ouvre la porte à une vie plus épanouissante, où chaque choix conscient rapproche de vos aspirations les plus profondes.
C’est en délimitant le chaos de l’indécision que vous tracez un chemin vers la réussite professionnelle et personnelle, et surtout, avec moins de prises de tête.