Max Planck, après avoir remporté le prix Nobel en 1918, a fait le tour de l’Allemagne pour donner une conférence sur la nouvelle mécanique quantique.
Son chauffeur a fini par mémoriser la conférence et lui a proposé de la faire à sa place pendant qu’il se reposerait dans la salle déguisé en chauffeur.
Planck a décidé de jouer le jeu et le chauffeur a réussi à donner la conférence avec succès.
À la fin, un professeur de physique a posé une question complexe.
Le chauffeur, plutôt que de se laisser déstabiliser a répondu :
« Je suis surpris que dans une ville avancée comme Munich, on me pose une question aussi élémentaire. Je vais demander à mon chauffeur d’y répondre ».
Et Max Planck, déguisé en chauffeur, s’exécuta.
De cette histoire connue est née l’idée de ce qu’on appelle « Le niveau de connaissance du chauffeur ».
C’est le niveau de connaissance des faux experts, de ceux qui répètent des trucs appris, entendus ici et là.
Ils ne savent pas répondre à la question suivante, celle plus difficile, plus complexe, qui demande d’avoir le niveau d’expertise nécessaire pour y répondre.
La connaissance du chauffeur, c’est l’effet Dunning-Kruger.
Les « chauffeurs » peuvent faire impression, ils peuvent très bien parler en public, être à l’aise en société, avec l’image et les réseaux sociaux.
Ils sont incapables de répondre aux questions qui ne reposent pas sur la mémorisation.
Ils ne peuvent pas expliquer les choses sans utiliser de jargon, de termes vagues ou d’arguments fallacieux.
Ils n’ont aucune idée de la façon dont les choses interagissent.
N’importe quel imbécile peut savoir. Le but est de comprendre.
Albert Einstein
Le problème est qu’il est difficile de séparer les deux.
Les copieurs sont souvent des imitateurs très efficaces et très convaincants.
Alors, comment faire la différence entre le vrai et le faux ?
Dans The Art of Thinking Clearly, Rolf Dobelli donne quelques conseils :
Il existe un indicateur clair : les vrais experts reconnaissent les limites de ce qu’ils savent et de ce qu’ils ne savent pas. S’ils se trouvent en dehors de leur cercle de compétences, ils se taisent ou disent simplement : « Je ne sais pas « , ce qu’ils disent sans ambages, voire avec une certaine fierté.
Des chauffeurs, nous entendons toutes les répliques, sauf celle-ci.
Rof Dobelli
J’ajouterai dans le lot toutes les personnes qui esquivent les questions complexes ou la confrontation de leurs idées.
En général, ce sont des chauffeurs.
Faire le tri entre les personnes qui ont de vraies connaissances et celles qui n’en ont pas est si important qu’Elon Musk en parle souvent dans ses interviews.
Il explique que le fait de demander aux candidats d’expliquer leur raisonnement à plusieurs niveaux l’aide à déterminer s’ils ont vraiment travaillé sur le problème.
En fait, l’une des façons lorsque j’interroge quelqu’un … est de lui demander de me parler des problèmes sur lesquels il a travaillé et de la façon dont il les a résolus.
Et si ce quelqu’un est vraiment la personne qui l’a résolu, il sera capable de répondre à plusieurs niveaux – il sera capable d’aller au fond des choses.
Et si ce n’est pas le cas, elle sera bloquée.
Et alors vous pouvez dire, « oh cette personne n’était pas vraiment la personne qui l’a résolu parce que toute personne qui se débat avec un problème ne l’oublie jamais. »
Elon Musk
Pour moi, c’est la meilleure méthode. On reconnaît rapidement quelqu’un qui a du savoir, mais pas la connaissance.
C’est aussi une des raisons qui fait que je pense que la connaissance de soi, des autres et de l’humain est essentielle.
Quand on comprend comment on fonctionne, quand on connait ses zones d’ombres, ses défauts et ses qualités, on les reconnait mieux chez les autres.
On reconnait les faux, les hypocrites et les menteurs.
On apprend à s’entourer mieux.
On évite les pièges de certaines relations affectives toxiques.
Et alors on se dit « mais comment j’ai fait pour ne pas le voir avant ».
On ne pouvait pas, on avait des connaissances de chauffeur.